La confiance pour avancer…

Je dois avoir confiance dans le fait que le message de tel ou tel messager est bon pour moi pour le suivre. C’est pour cela que le discernement est indispensable pour s’élever. Être vigilant est donc tout aussi important que la confiance en l’Autre. De nos jours, nous avons retiré notre foi envers les sages. La peur de la manipulation, la trahison, l’ayant étouffé et nous ayant figés dans ce domaine entre paranoïa et peur. Puis de là, on critique la société expliquant un vide dans les domaines de l’éthique. S’esclaffant que nous vivons dans une société scientiste qui en a oublié la sagesse. Mais Si, comme on aime à l’entendre, le changement collectif doit passer par le changement personnel, alors où en sommes-nous sur cette question ?

 Exister est un fait, vivre est un choix.

 Le monde occidental dans lequel nous vivons est devenu « une chose » voir même pour certains « une marchandise » que nous consommons, où la dimension subtile de notre existence est douloureusement absente. Pourtant, l’appel du sacré est bien là, comme un autre réel caché derrière le voile de notre (in)existence. Nous vivons dans le XXIᵉ siècle, le siècle où la population cherche un emploi qui se raréfie ou travaille 8h par jour, 6 jours par semaine pour tenter de gagner sa vie, qu’il a déjà. Il n’y a encore pas si longtemps, la majorité des produits que l’on utilisait étaient fabriqués par les personnes qui les utilisaient et de ce fait chacun savait les réparer, ce qui nous rendait autonomes.

 De nos jours, si notre smartphone, télévision, voiture, four-micro-ondes, lave-linge… Tombe en panne non seulement nous devons appeler un réparateur, mais il y a de grande « chance » que celui-ci ne puisse rien y faire et qu’il nous conseille d’acheter un nouvel article. Attention, ceci n’est pas une critique envers le progrès technologique qui nous a libérés de certaines formes d’aliénation et de pénibilité pour nous offrir plus de temps pour nos loisirs. Ceci est une remarque pour tenter de conscientiser comment une société, grâce à son augmentation de connaissance, nous a virtualisé, nous coupant du savoir-faire jusqu’ici transmis de génération en génération pour nous focaliser sur une société basée sur le social et le service. 

Pour G. Bronner, la confiance est nécessaire à toute vie sociale, et plus encore pour les sociétés démocratiques, qui s’organisent autour des progrès de la connaissance et de la division du travail intellectuel. En effet, à mesure de la production de cette connaissance, la part de ce que chacun peut espérer maîtriser de cette compétence commune diminue. Plus la société sait de choses, moins la part de ce que je sais est proportionnellement importante. Nul n’ignore que si un individu, il y a quelques siècles, pouvait espérer maîtriser l’ensemble des connaissances scientifiques, ce serait inenvisageable aujourd’hui. Cela signifie qu’une société fondée sur le progrès de la connaissance devient, paradoxalement, une société de la croyance par délégation, et donc de la confiance, ce qu’avait compris Tocqueville en son temps :  « Il n’y a pas de si grand philosophe dans le monde qui ne croie un million de choses sur la foi d’autrui, et ne suppose beaucoup plus de vérités qu’il n’en établit. Ceci est non seulement nécessaire, mais désirable. » Désirable, sans doute, car on n’imagine pas qu’un monde où chacun vérifierait frénétiquement toute information pourrait survivre longtemps.

  

Vivre passe par une confiance en soi, en l’autre, et en la vie.

 Comment peut-on vivre dans une société qui nous pousse à chaque instant à être dans la survie ? Partons d’un exemple. Imaginez-vous le matin partir au travail en voiture, lorsqu’un chauffard vous grille une priorité et évite de justesse l’accident. Le stress causé par cet évènement va sûrement nous énerver un moment, nous allons peut-être même crier sur la voiture en question. Puis en arrivant au boulot, nous allons raconter cette histoire à nos collègues autour d’un café pour rager sur les nombreux chauffards qui nous ont déjà fait le coup. Puis en fin de journée, allons raconter à notre époux, ou notre épouse ce qui nous est arrivé le matin même en soulignant les dangers de la conduite. Certes, la conduite du chauffard ne nous appartient pas et n’est pas de notre fait, seulement les répercussions que cela entrainera dans notre vie l’est. Le fait que nous allons rester en colère dans la voiture, puis ranimer cette colère au boulot, voir réveiller des colères enfouies chez des collègues qui ont vécu la même histoire dans le passé, et enfin la réveiller à nouveau dans le cercle familial en fin de journée et de notre responsabilité. Nous aurions pu, tout simplement, être dans l’acceptation, c’est-à-dire non pas de valider la conduite du chauffeur, mais accepter qu’elle ai eu lieu, accepter que je puisse avoir eu peur, et ainsi passer à autre chose, laissant cette peur filer au lieu de la nourrir à chaque rencontre de la journée.

 Nous ne sommes donc pas responsables des actes des autres, mais nous sommes responsables des répercussions que ces actes ont sur nous-mêmes et les émotions que ceux-ci engendrent. De nombreux médecins ont montré le lien étroit qu’il peut y avoir entre des émotions mal digérées et une pathologie physique qui s’inscrit dans notre corps. Tous messages ancrés dans le corps ressortent automatiquement, que ce soit par la parole, par les émotions ou par une pathologie physique. En cela, il ne faut pas confondre la résignation qui est une émotion gardée soi-même sous le sentiment de ne pouvoir rien faire, et l’acceptation qui est une forme de lâcher-prise sur ce qui est, pour se libérer l’esprit et construire à partir de ce qui est, le changement que l’on souhaite. Il n’y a donc pas de validation du problème dans l’acceptation, mais bien un lâcher-prise émotionnel qui ne bloque que notre créativité positive, enfermé dans un sentiment négatif.

 Il est temps de bien considérer ton comportement sur le chemin de la sagesse : es-tu excessivement rigoureux, grave et sérieux, alors apprends à rire et à danser avec les autres.  Es-tu excessivement enthousiaste et passionné, apprends à te poser et à te concentrer.  Folie et sagesse sont souvent étroitement liées, l’important étant de garder ce brin de folie que nous avions enfant, tout en gardant les pieds sur terre par la responsabilité des actes que nous faisons. La voie du milieu amène à vivre notre existence et non à la laisser défiler.

 À notre époque, la société a tellement voulu nous sécuriser que nous avons oublié la prise de risque qui est inhérente à la vie. Dans de nombreuses sociétés, la vie est vue comme une prise de risque constante, de là, une personne âgée qui a réussi à vivre jusque-là est une personne pleine de sagesse qui a su prendre des risques tout en sachant comment éviter les pièges. Dans notre société où le risque est refusé, et doit être « réglé » par l’État, la personne âgée en devient une personne qui a bien écouté, l’État n’a plus grand-chose à apporter aux jeunes générations, qui de toute manière sont bien plus compétentes que les anciens sur les nouvelles technologies qui de nos jours guident nos vies. Accepter la part de risque inhérente à l’existence nous fait avoir un lâcher-prise sur les difficultés passagères et nous redonne confiance en à la vie.

 

 En Occident, l’Autre est vu d’abord comme un ennemi avant de le voir comme un hypothétique ami, de là toute démarche de confiance est impossible. Cette vision, bien que basée fortement sur une vision utilitariste et libérale fortement ancrée dans notre culture depuis peu, est aussi basée sur la question du risque que l’on soit prêt à prendre en offrant notre confiance en l’autre. Plus nous avons confiance et donnons notre confiance en acceptant le risque que cela comporte, plus nous recevons la confiance de l’autre. Cela fait de notre vie un partage et un équilibre entre soi, le monde et l’environnement et non plus un combat permanent entre nous et le reste du monde.

 

 Dans un ancien texte, une personne disait : « je ne crois que ce que je vois », eh bien, je pense au contraire que nous voyons que ce que nous croyons. De plus en plus de théories psychologiques montrent très bien cela, voir par exemple dans la gestalt, la théorie des formes. De plus, je pense que cette vision dépasse largement le sens de la vue, et a une répercussion sur la manière dont nous nous plaçons dans le monde et le choix que nous faisons entre, survivre dans cette existence ou vivre pleinement cette expérience qui nous est proposée.  Si nous voyons la vie comme un combat permanent entre soi et le reste, la vie nous présentera des épreuves pour que notre croyance soit conforme à notre perception, si au contraire, nous voyons la vie comme une expérience de coopération entre soi, les autres et notre environnement, alors notre vie ira dans une direction qui créé de la coopération, de l’entraide pour être en conformité avec la perception que nous avons de l’existence. Nous avons tous ce choix à faire, le reste du voyage ne dépend que de nous.