Comment la gauche se retrouve à chercher un commun sans langage

Il y a des batailles qui se gagnent à coups de lois, d’autres à coups d’emblèmes, et puis il y a celles, bien plus profondes, qui se remportent par la maîtrise des mots. Les forces conservatrices et réactionnaires l’ont bien compris : pour orienter l’avenir, il suffit souvent de repeindre quelques vieux termes républicains avec des couleurs idéologiques nouvelles, puis de proclamer qu’il s’agit de la palette originelle. Pendant ce temps, la gauche hésite entre défendre des mots vidés de leur sens ou inventer d’autres langages, ce qui la conduit parfois à additionner des singularités sans parvenir à forger un véritable horizon commun.

 

 

Quand les mots changent de camp : la capture sémantique comme stratégie politique

Depuis une quinzaine d’années, un mouvement profond traverse l’espace public : la droite conservatrice, et plus encore l’extrême droite, réinvestissent les termes historiquement portés par les traditions républicaines de gauche, en particulier ceux liés à l’unité : république, universalité, citoyenneté, peuple, intérêt général, laïcité, et même communStéphanie Roza, dans La gauche contre les Lumières ?, a montré comment une confusion idéologique contemporaine permet aux courants réactionnaires de s’emparer de l’héritage universaliste, tout en le tordant subtilement vers une défense ethno-culturelle de la nation. Dans cette opération, les mots demeurent, mais leur âme change de propriétaire. La manœuvre est double : Délégitimer la gauche en l’accusant d’avoir abandonné l’universalité, de la réduire à un “compte-rendu des minorités”. Se présenter comme le dernier rempart de l’unité nationale, en redéfinissant cette unité comme homogénéité, tradition ou ordre. C’est, pour reprendre la métaphore de Bourdieu, un “coup de force symbolique” : on ne gagne pas l’hégémonie en argumentant, mais en redessinant le dictionnaire du politique.

 

Universalité détournée : de l’émancipation à l’exclusion

Historiquement, l’universalité républicaine est une promesse d’ouverture : elle postule que tout être humain possède une dignité égale, et que les institutions doivent tendre vers cette égalité. C’est la tradition des Lumières, imparfaite, certes, mais féconde dont Roza rappelle qu’elle fut un moteur d’émancipation, pas un projet de domination.La droite et l’extrême droite utilisent aujourd’hui ce même langage, mais opèrent une torsion :

  • L’universalité devient identitaire : elle sert à imposer une norme, non à garantir une égalité.
  • La citoyenneté devient conditionnelle : réservée à ceux qui “adhèrent aux valeurs” définies par les gardiens autoproclamés de la tradition.
  • La laïcité devient instrument de contrôle culturel, au lieu d’être une architecture de libertés.

Ce glissement sémantique permet de défendre des positions réactionnaires tout en arborant la bannière de l’universel, une sorte de prestidigitation linguistique où le magicien montre sa main droite pour cacher ce que fait sa main gauche.

 

Une gauche sans mots pour dire le commun ?

Face à ces captations, la gauche se trouve dans une situation paradoxale. Les mots du commun ayant été récupérés, elle peine parfois à proposer : un récit unificateur, une vision positive de l’intérêt général, une langue capable de relier plutôt que d’additionner.

Beaucoup de chercheurs en sciences politiques décrivent ce mouvement où les organisations progressistes se replient sur la défense des minorités, non par manque de conviction universaliste, mais par défaut d’outils linguistiques crédibles pour reconstruire un horizon partagé. La gauche, dépossédée des mots de l’unité, se voit contrainte d’improviser :
elle bricole, additionne, compose des mosaïques d’identités… mais cette arithmétique peine à devenir une véritable géométrie politique. Il ne s’agit pas uniquement d’un problème rhétorique. Les mots façonnent notre manière de percevoir le réel. La philosophe Judith Butler nous rappelle que nommer, c’est déjà agir. Et dès lors que la droite s’approprie les mots du commun, elle modèle la manière dont la société imagine le vivre-ensemble.

On observe alors une triple crise :

  1. Crise de la représentation : qui parle au nom du peuple ?
  2. Crise de l’universalité : comment articuler singularités et horizon commun ?
  3. Crise du récit : comment dire la société de manière sensible et mobilisatrice ?

C’est une bataille culturelle au sens gramscien : l’hégémonie se construit en amont du politique, dans le domaine de l’imaginaire. 

 

Pour redonner souffle au commun : pistes pour un langage renouvelé

Certaines pistes émergent dans les travaux contemporains, souvent en marges disciplinaires philosophie, sociologie critique, anthropologie politique, écologie sociale. Elles dessinent une refondation possible :

  • Repenser l’universel comme processus, non comme norme

Inspiré de Roza, cette approche distingue l’universalité abstraite (qui exclut) de l’universalité concrète (qui s’élabore dans les luttes, les pratiques, les institutions vivantes).

  • Revaloriser la notion de commun sans l’essentialiser

Les travaux de Pierre Dardot & Christian Laval, montrent que le commun n’est pas un héritage figé, mais une pratique collective.

  • Inventer un langage politique sensible

Ici, la poésie sociale devient une ressource. Le commun ne se décrète pas ; il se raconte.
Un mot respiré avec finesse peut valoir mille programmes.

  • Penser l’unité comme polyphonie

Les sociétés contemporaines ne sont plus homogènes ; elles sont orchestrales. L’avenir de la gauche pourrait bien être une universalité musicale : différentes voix, mais un même souffle.

 

Jérôme Baschet : réinventer le commun par la pluralité des mondes

Historien médiéviste devenu penseur des alternatives, Baschet s’est nourri de l’expérience zapatiste pour proposer une vision du politique qui échappe précisément à la capture des mots. Dans Adieux au capitalisme ou Basculements, Baschet défend l’idée que le commun n’est pas l’unité imposée d’en haut, mais l’autonomie organisée d’en bas. Cela implique : des communautés auto-instituantes, un “gouvernement des différences”, une articulation non-hiérarchique entre mondes pluriels. Tandis que la droite identitaire fixe l’unité dans l’homogénéité nationale, Baschet propose une unité relationnelle, faite de ponts, de négociations, de coexistence active. Baschet montre que les zapatistes ont forgé un “nous” qui ne repose ni sur l’identité ethnique ni sur une fiction d’universalité abstraite, mais sur un projet politique : être ensemble pour transformer le monde, sans devoir être les mêmes. La modernité (surtout dans sa version jacobine) conçoit l’unité comme centralisation. Baschet propose de la concevoir comme constellation, assemblage mouvant. C’est là une ressource conceptuelle majeure pour contester la prétention de la droite à monopoliser les mots de l’unité.

 

Arturo Escobar : penser le commun à partir des mondes qui vivent

Anthropologue colombien et figure majeure de la pensée décoloniale, Escobar ouvre une brèche essentielle : sortir de “l’onto-politique occidentale” pour accueillir les “plurivers”  idée sœur de Baschet. Dans Designs for the Pluriverse ou Sentir-penser avec la Terre, Escobar montre que le monde moderne s’est construit sur l’idée d’un unique mode d’être, d’un univers homogène et administrable. La droite et l’extrême droite héritent et radicalisent cette ontologie : un seul peuple, une seule culture, une seule logique. Le plurivers, au contraire, affirme : une pluralité irréductible de manières d’habiter le monde, un commun qui se tisse entre des ontologies diverses, une politique relationnelle. Cela permet de penser un commun sans tomber dans l’universalisme répressif que les droites cherchent à imposer. Escobar parle moins du commun que du communal, c’est-à-dire la capacité des communautés à s’organiser autour de formes de vie interconnectées : solidarité organique, responsabilité réciproque, liens avec le vivant non humain, gouvernance horizontale. C’est une version décoloniale du commun profondément incompatible avec l’unité identitaire promue par la droite.

 

Pour un universalisme inclusif : dépasser l’abstraction sans renoncer à l’ambition

Un universalisme inclusif n’est pas une contradiction. Il est au contraire la forme mature, adulte, consciente de ses angles morts, de l’universel des Lumières. L’universel ne tombe pas du ciel : il se construit dans les luttes. Escobar et Baschet le rappellent depuis les marges ; Kant et Diderot l’annonçaient déjà. Dans une société pluraliste, la raison est ce qui permet à des expériences irréductibles de se parler sans s’annuler. Elle n’est pas l’ennemie des subjectivités, mais leur médiatrice. Un universel inclusif ne cherche pas à effacer les différences, il cherche à les relier dans une même architecture éthique. L’un des apports majeurs de Stéphanie Roza réside dans sa défense subtile de l’universalisme. Mais attention : un universalisme vif, conscient des blessures qu’on lui reproche, vigilant sur ses propres excès. Elle distingue avec précision : l’universalisme abstrait, souvent complice d’aveuglements sociaux ; de l’universalisme d’émancipation, qui s’est construit dans les combats concrets contre les oppressions. Ce second universalisme n’est ni occidental, ni réservé à quelques penseurs européens : il est un principe politique qui a voyagé, muté, été réinventé par ceux qui luttent, des abolitionnistes noirs aux féministes, des décoloniaux lucides aux mouvements ouvriers. Ainsi, Roza montre que l’universel n’est pas l’ennemi des identités blessées, mais leur arme la plus puissante : un langage commun pour dire l’injustice et la combattre. C’est là une posture rare aujourd’hui, où la tentation du repli, identitaire, culturel, communautaire, rôde comme une ombre sur le politique. La pensée de Roza, elle, garde une confiance têtue, presque poétique, dans la possibilité d’un monde où la singularité et l’universalité ne s’excluent pas, mais se répondent. Cette alliance entre rationalisme et pluralité ouvre une voie fortement contemporaine : celle d’une raison sensible, une raison qui n’écrase pas le vécu mais le met en perspective. Un universel qui n’est plus une forteresse, mais un pont. Un héritage des Lumières non pas figé dans le marbre, mais respirant dans le monde, traversé par les anthropologies du plurivers, par les cosmopolitiques autochtones, par les sciences sociales critiques, par les luttes collectives.

 

Revenir à la raison : pour un universel vivant dans un paysage intellectuel fracturé

La question de la raison revient aujourd’hui avec une acuité particulière, tant les débats contemporains semblent gouvernés par les affects plus que par les arguments, et par des récits identitaires plus que par des principes partagés. Dans un contexte où la droite réactionnaire nourrit une défiance croissante envers la rationalité critique, et où certains courants post-modernes à gauche s’emploient à déconstruire l’idée même d’universel, il devient nécessaire de réhabiliter une conception élargie, dynamique et inclusive de la raison. Celle-ci ne relève ni d’un retour nostalgique aux Lumières, ni d’un geste conservateur, mais d’une nécessité politique : reconstruire les conditions du commun dans une époque où les expériences subjectives tendent à se fragmenter en micro-réalités difficilement communicables.

La pensée réactionnaire, telle qu’elle s’exprime aujourd’hui, repose souvent sur un rejet explicite de la raison au profit d’un imaginaire mythifié. Elle lui oppose la tradition érigée en essence intemporelle, la nature invoquée comme ordre intangible, ou encore le récit national célébré comme vérité indiscutable. Ce refus de la raison ne relève pas seulement d’une posture anti-intellectuelle ; il constitue un choix politique structuré. La raison est perçue comme subversive, car elle interroge les évidences, déconstruit les mythes fondateurs et met à nu les mécanismes de domination cachés dans les appels à l’héritage ou à l’autorité. En remplaçant l’analyse par l’affect, la discussion par la croyance, la nuance par l’opinion viscérale, la droite réactionnaire crée un espace où le politique se réduit à une mobilisation émotionnelle. La raison devient ainsi l’adversaire d’un projet qui a besoin de mythes pour perdurer.

À l’autre extrémité du spectre, une méfiance d’un autre type s’exprime dans certains segments de la gauche déconstructiviste. Ici, la raison est soupçonnée d’être intrinsèquement liée aux structures de pouvoir qui ont façonné la modernité : l’eurocentrisme, le patriarcat, la domination coloniale ou les normes hégémoniques de la connaissance. Si cette critique met au jour des angles morts indispensables à examiner, elle glisse parfois vers une forme de relativisme radical où toute prétention à la vérité commune devient suspecte. Dans cette perspective, chaque subjectivité tend à être perçue comme un monde autonome, doté d’une légitimité hermétique aux autres. La discussion rationnelle peut alors être interprétée comme une entreprise normative visant à imposer un cadre de pensée dominant. Cette posture fragmente le champ politique en une mosaïque d’expériences incommensurables, rendant difficile l’élaboration d’un horizon partagé ou la formulation d’un projet collectif.

Face à ces deux formes de rejet, l’une régressive, l’autre relativiste, revenir à la raison apparaît non comme une régression, mais comme un impératif. Cependant, il ne s’agit pas de restaurer un rationalisme abstrait et autoritaire. À la suite de penseurs et penseuses comme Stéphanie Roza, il convient de promouvoir une conception élargie de la raison, capable d’intégrer les apports des critiques contemporaines sans renoncer à l’exigence d’un langage commun. Ce rationalisme élargi reconnaît la valeur des expériences vécues, accueille la pluralité des perspectives, et demeure attentif aux conditions historiques de sa propre élaboration. Il refuse la clôture dogmatique tout autant que l’éparpillement relativiste. Dans cette perspective, la raison représente moins un instrument de domination qu’un espace de traduction. Elle permet de passer du registre émotionnel, où chacun ne dispose que de son ressenti, à un cadre commun où les expériences peuvent être mises en perspective, discutées, reformulées. Loin de nier les singularités, elle les rend intelligibles les unes aux autres. Sans cet espace rationnel partagé, les subjectivités restent condamnées à coexister sans se comprendre, enfermées dans des récits qui ne communiquent plus entre eux. La raison, au contraire, offre un sol commun où le “je ressens” peut se transformer en “nous comprenons”, c’est-à-dire en une forme de reconnaissance mutuelle nécessaire à la vie démocratique. Réhabiliter la raison revient ainsi à défendre un universel vivant. Cet universel n’est pas celui, abstrait et homogénéisant, souvent caricaturé par ses critiques ; il est le résultat de luttes, de débats, de conflits et de réappropriations successives. Il s’enrichit des voix qui l’interrogent et se transforme au contact des expériences minoritaires. Loin d’imposer une mesure unique, il constitue un espace dans lequel chacun peut entrer sans renoncer à sa singularité. Penser l’universel comme un chantier plutôt que comme un monument conduit à comprendre qu’il s’agit moins d’une essence que d’une pratique : celle de chercher, en commun, les principes capables d’ordonner nos désaccords.

Relire les philosophes des Lumières à la lumière des pensées contemporaines, ce n’est pas sacraliser un âge d’or révolu. C’est reconnaître que leurs concepts sont devenus des matériaux vivants, traversés de critiques, de prolongements, de réinterprétations. Dans un monde réactionnaire obsédé par l’autorité, l’idée kantienne d’autonomie penser par soi-même conserve une puissance subversive. Les critiques féministes, postcoloniales ou intersectionnelles ont montré les limites concrètes de cette autonomie. Mais ces objections ne détruisent pas le concept : elles en révèlent les conditions historiques d’inachèvement. L’autonomie n’est pas donnée : elle se conquiert. À l’heure où certains courants réactionnaires réhabilitent le chef, l’ordre, la verticalité, relire Montesquieu rappelle que l’équilibre des pouvoirs n’est pas un luxe juridique, mais une protection contre la tyrannie émotionnelle. Montesquieu, éclairé par les travaux contemporains sur l’autoritarisme, devient une ressource pour comprendre comment les affects collectifs nourrissent les dérives réactionnaires. Le matérialisme ouvert de Diderot, chaleureux, traversé de curiosité pour les cultures du monde, rejoint les pensées de Baschet, d’Escobar, de Latour. Diderot n’était pas universaliste par abstraction, mais par amour de la diversité. La gauche contemporaine, fragmentée entre universel et particularismes, trouverait ici une clé : l’universel ne s’oppose pas au multiple, il s’y tisse.

Dans un paysage intellectuel saturé de discours désenchantés, cette réhabilitation de la raison se présente comme une forme de résistance. Il ne s’agit pas d’une résistance bruyante, mais d’une résistance discrète et tenace, fondée sur la clarté conceptuelle, la lucidité critique et l’attention aux conditions de possibilité du dialogue. La raison, comprise de manière élargie, devient alors un acte d’espérance : la conviction qu’il est encore possible de penser ensemble, que la parole peut reconquérir un sens, et que le commun n’est pas condamné à disparaître sous les assauts conjoints du mythe réactionnaire et du relativisme déconstructiviste. Ainsi définie, la raison n’est pas une froide abstraction. Elle constitue un effort collectif pour transformer la dispersion des expériences en une communauté de réflexion. Elle est, pour notre époque, un instrument précieux pour recomposer un “nous” fracturé, retisser les liens du débat démocratique et ouvrir à nouveau l’horizon du politique. Revenir à la raison, c’est finalement accepter de croire que nos divergences ne sont pas des murs, mais des points de départ pour une construction commune. C’est, en somme, refaire société par l’intelligence partagée.

 

 

Conclusion : retrouver les mots qui portent l’avenir

Il faut comprendre la capture sémantique non comme une simple guerre de vocabulaire, mais comme une lutte pour le cœur symbolique du politique. La droite réactionnaire a compris que celui qui définit les mots définit les possibles.

La gauche, pour retrouver un horizon, doit non seulement critiquer ce détournement, mais aussi réinventer la langue du commun, une langue où l’universel n’écrase pas les différences, mais les relie ; une langue où la citoyenneté n’est pas une barrière, mais une promesse ; une langue où l’avenir n’est pas un retour en arrière, mais une marche poétique vers l’inédit. L’avenir du commun n’est pas derrière nous mais devant, dans des formes encore en germe, dans des pratiques de vie communes, dans des récits renouvelés.  La suite des Lumières s’écrit maintenant. Non dans l’imitation nostalgique, non dans la rupture iconoclaste, mais dans une fidélité inventive, celle qui sait que le passé n’est pas un cimetière, mais un réservoir de concepts, un chantier ouvert, un atelier d’avenir. Revenir à la raison, relire les Lumières, puiser dans Baschet, Escobar, Roza, Latour, Fraser, c’est rouvrir l’espace d’un universel qui ne s’impose plus par la force, mais qui s’élabore dans la relation. Un universel inclusif, hospitalier, conscient de ses limites, et pourtant tourné vers l’infini de ce que nous pouvons être ensemble. Lire Stéphanie Roza, c’est redécouvrir que l’avenir de la gauche n’est pas un mirage, mais une construction, patiente, critique, inventive. C’est comprendre que les Lumières n’ont rien perdu de leur puissance, à condition de les repenser avec soin. Et c’est, peut-être, retrouver la possibilité d’un monde où la raison, la justice et la liberté forment encore un triptyque d’espérance. Sa pensée, à la fois ferme et nuancée, rappelle que le politique n’est pas seulement affaire de rapports de force, mais aussi de transmission, de horizon, et d’un certain art de croire encore. Un art éminemment nécessaire et profondément vivant. Il n’y a peut-être là rien de moins qu’un travail de fond, patient, presque artisanal : réapprendre à dire le monde d’une manière qui donne envie d’y vivre ensemble. Une politique qui aurait le courage rare de mêler rigueur du concept et audace du lyrisme cette flamme fragile qui, parfois, remet l’avenir en marche. Une manière, lyrique et rigoureuse à la fois, de dire : le commun n’a pas disparu il attend qu’on le réinvente.

 

 

Faire société : l’imaginaire comme fondement politique