D’un côté la politique qui vit dans un monde extrêmement complexe qui demande une analyse super dure ; et d’un autre côté, il y a la vie de la population qui est en souffrance, ne comprend plus et ne réalise plus la complexité de ce monde.
Ces 2 univers ne se comprennent pas, car ils n’ont aucun référentiel commun (aucune base commune).
Du coup, d’un côté, les politiques font de la langue de bois, car personne ne veut écouter la complexité et l’analyse qui se passe dans cette sphère. D’un autre côté la population qui n’en peut plus, cherche des alternatives (hors de l’institution) ou cherche à vouloir changer les choses qu’elle ne comprend plus.
Comment est-on arrivé à cette situation ?
La séparation entre politique et champs politique vient d’une sur-délégation des pouvoirs. Étant donné que pour prendre des décisions nous n’avons pas les moyens technologiques, et le temps, pour pondérer l’avis de tous le monde. Du coup pour palier à ça on met en place le système de représentation. Des représentés, qui ont tous un pouvoir individuel faible, mais réel, délègue leur pouvoir à un représentant dont le but est d’agglomérer le pouvoir. Il est donc le représentant de ses représentés.
Sauf, qu’il y a un effet pervers à ça. Déléguer, équivaut à dire “je ne m’en occupe pas, je te transfère cette tâche“. Il y a donc un désengagement de la part de celui qui délègue. À petite échelle, ça ne pose pas de problème, surtout si celui qui délègue à son représentant doit malgré tout rester actif. Mais dans le cas d’une professionnalisation (politique, syndicale, associative,…) les représentés n’ont plus de raison de rester actif, car ils sont devenus quasi exclusivement spectateurs. Ils n’ont désormais plus qu’un rôle de légitimation. À certaines occasions ils légitiment les personnes qui sont censées les représenter : “je suis votre représentant, vous me représentez, je vous ai convoqué et vous êtes venus, cela veut donc dire que je suis légitime à vos yeux“.
Une délégation forte, voir quasi-total crée donc un désengagement à la hauteur des pouvoir délégués. “Pourquoi se soucier de ce qui se passe ?! Quelqu’un s’en occupe à ma place, qui plus est, c’est un professionnel qui a accès à beaucoup plus d’informations que moi, ces décisions sont donc plus justes“.
>>Comment faire pour diminuer les pouvoirs délégués à ces représentants ? Qui tiennent à leurs postes maintenant !
C’est là où le bât blesse ! Étant donné que ce sont certains professionnels de la politique (pouvoir législatif ou exécutif) qui ont le monopole de la Loi (de l’initiative à l’adoption). Dans un tout premier temps : mettre plus de diversité socio-culturelle à l’Assemblée. Ensuite réussir à imposer une négociation avec ces élus (le plus simple, c’est avec les députés) pour qu’ils mettent en place des outils démocratiques : reconnaissance de la pétition, référendum d’initiative populaire, votation populaire. Bref des outils de démocratie directe ou participative.
Dans ce bouquin http://www.aeinstein.org/books/self-liberation/ l’auteur, qui à étudié dans un cadre universitaire les différents mouvements de libération, préconise directement que les groupes qui veulent changer les choses doivent compter sur eux-mêmes et ne pas espérer d’aide extérieure pour agir (mais accueillir et intégrer toute aide sincère).
Pour en revenir aux outils démocratiques que j’ai cité précédemment, ils ne vont pas tomber du ciel et des personnes seules et isolées, même ultra motivées et ingénieuses, ne pourront rien faire. Il faudra agir de manière groupée.
Ensuite, il faut comprendre la vision des citoyens. (résumé des discours trouvables sur les réseaux-sociaux)
La politique, ce n’est pas si compliqué et chacun d’entre nous peut le comprendre : à la base, c’est la gestion du “vivre ensemble”, un ensemble de règles, de codes et de lois pour que les relations sociales se développent au mieux, à l’interieur et à l’extérieur du pays.
Le souci, c’est le carriérisme politique qui fait que certains, pour garder le pouvoir le plus longtemps possible, complexifient volontairement la discipline politique pour que les gens du peuple qui n’ont pas fait l’ENA aient l’impression que c’est vraiment trop dur à comprendre.
Les médias jouent le jeu et nous embrouillent avec des mensonges ou des demi-vérités (comparer les infos de l’époque de nos grand-parents et celles d’aujourd’hui : en terme de qualité, il n’y a pas photo). Les infos qu’on nous donne sont tellement floues et superficielles qu’on n’est pas en mesure de reconnaître les idées qui vont avec (cf Macron et son super “projet” dont personne ne comprend exactement en quoi il consiste). Cependant, les médias se basent sur ce qui fait vendre : plus : le simple, le clash, la provoque, que le complexe (que regarde-t-on des débats à l’assemblée nationale ? En général là ou il y a “de l’action»).
On peut intéresser les gens à tout, y compris des sujets supers compliqués, à condition de ne pas les prendre pour des imbéciles. Ce n’est pas la complexité de la discipline qui me rebute, mais l’état d’esprit de ceux qui la pratiquent, et ça se confirme quand un politicien qui m’inspire confiance (ils sont rares mais, il y en a) me donne envie de m’y intéresser, de me plonger dans des bouquins d’analyse pendant des jours, de mener des actions concrètes, de lutter pour que notre voix populaire soit entendue des élites qui nous gouvernent (alors qu’ils devraient juste nous représenter si on est bien en démocratie).
Analyse et critique de ce discours :
>> à la base, c’est la gestion du “vivre ensemble”, un ensemble de règles, de codes et de lois pour que les relations sociales se développent au mieux, dans et à l’extérieur du pays.
Oui, c’était peut-être vrai pour la politique jusqu’au début 20e, cependant la mondialisation, l’interconnexion à changer la politique de manière profonde. Voir la conférence ici de la société de l’incertitude : géopolitique et biopolitique du Monde à l’ère complexe. Exposé, donné par Magali Reghezza dans le cadre de la Chaire Géopolitique du Risque.
>>cf Macron et son super “projet” dont personne ne comprend exactement en quoi il consiste.
C’est justement pour moi une bonne illustration, à ce qui est noté au-dessus. De la langue de bois et de la pure communication en meeting, mais lorsque tu l’écoutes sur France culture, lorsque tu lis des articles qui explique sa vision du libéralisme égalitaire, son inspiration du Prince de Machiavel ou regarde Paul Ricoeur qui est un philosophe qui l’a grandement inspiré, tu rentres dans la profondeur de sa vision politique qui n’est pas cachée, mais intéresse d’un coup bien moins de personne. Voir les polémiques durant la campagne sur la colonisation et son message du roman national. Je ne suis pas du tout pour sa vision politique, mais je pense qu’il est fondamental de comprendre sur quel principe idéologique les politiques actuels foncent dans le même mur. Et passé à côté de ça, simplifie la vision politique avec des conclusions qui peuvent en devenir caricaturale et être une impasse pour sortir du problème (l’exemple étant le conspirationnisme qui tente de simplifier toute la politique à l’extrême).
Si on regarde les personnes qui parlent du sujet de la pensée complexe avec, par exemple, Edgar Morin ou Chantal Mouffe (qui inspire la vision politique de… Mélenchon), on découvre un rapport à la politique bien différents du spectacle médiatique expliqué par des difficultés nouvelles. Comme l’explique par exemple dans l’illusion politique Ellul, on voit que l’idéologie qui veut mettre l’accent sur ce point est pourtant bien à gauche et contre le système en place, ce qui rejette l’idée de rhétorique pour ne pas faire évoluer les choses.
>>On peut intéresser les gens à tout, y compris des sujets supers compliqués, à condition de ne pas les prendre pour des imbéciles.
Je suis tout à fait d’accord avec ça, il faut juste accepter que ça demande beaucoup de temps de réflexion. Car, je pars de ce même principe et de fait tente de montrer que cette complexité a été pensée. Sinon on attend que nos politiciens continue à aller vers le mur pour reconstruire autre chose ensuite voir le livre L’Effondrement des sociétés complexes.
>>Faudrait-il réfléchir, à comment établir un lien de confiance entre la population et une certaine part de l’élite intellectuelle ?
Pour cela, il faudrait que les politiques soient responsables et pour ça, il faut une forme de retour possible, si aucun engagement du mandat n’a été réalisé, ou si le mandataire prend un virage idéologique bien différent de celui pour lequel il a été élu.
>> La politique n’est pas affaire de pure rationalité, mais aussi intuitivement de ce que m’évoque en terme de sentiment le discours, et l’individu qui le prononce….ça fait à mon sens quelque chose de tout aussi valable (ni plus ni moins) que l’aspect rationnel.
Remarque et démarche très actuelle qui ne prends pas en compte un biais très important, connu en psychologie c’est “l’arc réflexe”.
Pour illustrer ce que c’est : imagine un mec catholique traditionnel à tendance extrême droite, et un mec humaniste à tendance extrême gauche. Les deux marchent dans la rue et croisent un couple homosexuel. Le premier va sentir en lui, intuitivement, du dégoût, du malaise, de la gêne…. il va donc en conclure au niveau intuitif et viscéral pour lui que c’est pas “normal” que c’est “déroutant” etc… l’autre ressentira de la joie, de l’amour, la beauté et va donc conclure au niveau intuitif et viscéral que c’est magnifique, naturel etc…. Les deux auront des ressentis intuitif aussi juste et aussi vrais en fonction de leur cadre inconscient. Et là on voit apparaître le problème de notre époque qui place l’intuitif à un niveau qui peut poser problème sur certains cadres.
Tout cela entraîne je pense, une grande majorité de personnes qui ne veut plus donner confiance et le voir ou le faire par soi-même, la place de l’autorité (c’est là la question de la confiance d’une élite) est très fortement critiqué voir rejeté de notre société actuelle (ni dieu ni maitre). Cependant, ne plus vouloir ni maître ni efforts me semble un luxe déraisonnable. Pour ne plus avoir besoin d’autorité extérieure, en admettant que ce soit possible, ça nécessite beaucoup d’efforts. Et si on ne veut pas faire d’efforts, je ne vois pas comment faire autrement que de s’appuyer sur une autorité qui elle a fait des efforts.
La grande question est donc : comment sortir de cette impasse structurelle pour sortir de l’impasse idéologique actuelle ?